Non, le management par les objectifs n’est pas universel !

Non, le management par les objectifs n’est pas universel !

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Peter Drucker est un homme d’exception, un « grand monsieur » du management. C’est indéniable ! Il a marqué de manière irréversible l’évolution des idées. Qu’il soit considéré par certains comme le « gourou des gourous », pourquoi pas. Mais comme le « père du management », non ! Il n’est pas plus l’inventeur du management que Frederick Taylor. Le management, concomitant à l’action collective finalisée, remonte à la nuit des temps. Les textes Sumériens, Grecs, Romains, Egyptiens,… vieux de plusieurs milliers d’années avant JC en portent déjà des traces.

Henri Fayol : le premier à avoir formalisé les principes du management

Non seulement Peter Drucker n’a pas inventé le management, mais il n’est même pas le premier à en avoir formalisé les principes. Un Français, Henri Fayol , l’a fait quarante ans avant lui. Ce praticien, qui a fini sa carrière comme directeur général de la société de Commentry-Fourchambault à Decazeville au début du siècle dernier, appréhende le management comme une fonction à part entière composée de cinq grandes catégories d’activités : la prévision, l’organisation, la coordination, le commandement et le contrôle. Nombre de travaux ultérieurs, tous anglo-saxons, ont ramené ces cinq catégories à quatre, intégrant la coordination à l’organisation.

Ce qui est présenté comme universel par Peter Drucker – le cycle fixation d’objectifs, suivi du travail et évaluation des résultats – n’est en fait qu’une déclinaison partielle et particulière du raisonnement managérial, pertinente seulement dans un contexte particulier : celui de l’expansion et de la décentralisation des grandes entreprises américaines des années 1950. Omission involontaire ? Peter Drucker ne se réfère jamais à Henri Fayol, dont les travaux sont pourtant largement connus des anglo-saxons au moment où paraît The Practice of Management.

Les règles ont précédé les objectifs

Le MPO n’a rien d’universel, donc. Un peu d’histoire encore pour continuer à s’en convaincre : avant de manager par les objectifs, on a managé par les règles. La vedette est déjà américaine ; elle se nomme Frederick Taylor. Les principes du management par les règles sont les suivants : le bureau des méthodes prescrit le travail des opérateurs – et pas seulement ses résultats comme dans le MPO – à travers des consignes, procédures, instructions de travail, modes opératoires ; les contre-maîtres, eux, contrôlent l’application des règles.

Le MPO est apparu au moment où les grandes entreprises américaines, du fait de leur taille et de la diversité de leur activité, se sont décentralisées. Pourquoi décentralise-t-on une organisation ? Pour donner la possibilité à chacune de ses unités d’adopter une stratégie spécifique, adaptée à un sous-environnement particulier. Sans aucune prescription des manières de faire, seuls les résultats à atteindre sont formalisés. L’unité décentralisée est la mieux placée pour savoir comment résoudre les problèmes auxquels elle est confrontée. Dans le management par les règles, on considère au contraire que le bureau des méthodes prime sur les opérateurs pour savoir comment résoudre les problèmes rencontrés par ces derniers. Il y a d’un côté ceux qui pensent, de l’autre ceux qui font.

Aujourd’hui, l’heure de gloire du management par les règles est passée. Si cette forme de management n’est plus dominante, elle n’a pas disparu pour autant. Elle est encore particulièrement présente dans les entretiens annuels qui, bien souvent, commencent par une description de fonction : formalisation des missions, des activités,…

Le retour en force du management par les processus

La réhabilitation de la notion de processus – terme moderne de procédé -, dans les démarches d’Assurance Qualité ou les fameux ERP (Enterprise Resource Planning) – Progiciel de Gestion Intégré (PGI) en français -, est même le signe d’un regain d’intérêt pour la règle comme levier de performance. Le management par les règles est parfois renommé management par les processus, le bureau des méthodes transformé en département qualité, responsable dans nombre d’entreprises organisées par processus de la formalisation et du suivi de ces derniers. L’appellation change, mais l’esprit et la logique restent les mêmes. On refait du neuf avec de l’ancien, pratique courante en matière de management.

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