Des organisations bâties pour changer

Des organisations bâties pour changer

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Dans une démarche de changement, la consolidation, troisième moment du processus de la transition (voir mon billet sur la différence entre changement et transition), doit être suffisante pour éviter un retour en arrière trop significatif et, surtout, un retour au point de départ. Il s’agit, pour parler comme les économistes, de créer un « effet de cliquet ».

En même temps, la consolidation ne doit pas être trop importante pour ne pas fossiliser la nouvelle organisation. Surtout dans le contexte actuel où les entreprises cherchent à développer leur agilité. Certains, comme Michel Crémadez ou Chris Worley, prônent même des organisations qui intègrent en elles-mêmes l’idée de changement. Des organisations bâties pour changer en quelque sorte !

Stabilité et adaptabilité

Ces organisations présentent de forts éléments de stabilité : leur vision stratégique, leur culture d’entreprise et l’investissement dans le développement des compétences de leurs collaborateurs ! Et, en même temps, des composantes opérationnelles très flexibles et rapidement modifiables et adaptables : la mise sur le marché de nouveaux produits, l’allocation des ressources budgétaires, l’organisation du travail, les mobilités internes,… Les temps de cycles opérationnels sont énormément réduits.

J’ai présenté, dans un billet précédent, les deux principales caractéristiques culturelles de notre représentation du changement : une rupture d’une part, déclenchée par un événement exogène d’autre part. Dans le contexte actuel, on insiste beaucoup sur les inconvénients de continuer à penser le changement en termes de rupture. Le recourt à la notion de transition est alors très utile pour l’action.

En revanche, on met moins l’accès sur l’inconvénient de la seconde caractéristique : le changement n’est pas naturel, on change pour s’adapter à une évolution de notre environnement. Et pourtant, c’est bien cela que les entreprises qui ont fait du changement le cœur de leur culture ont réussi à remettre en cause. Contrairement à ce que soutient la sagesse populaire, elles changent les équipes qui gagnent. Pourquoi ? Parce que, quand le changement s’accélère, souvent, quand une équipe commence à perdre, il est déjà trop tard : on n’a plus le temps d’en changer !

Ces entreprises pensent leurs organisations à durée déterminée

Ces entreprises prévoient de manière explicite un désengagement intentionnel en pleine phase de maturité, quand l’organisation  est encore très performante, bien avant qu’elle entre en phase de déclin. Elles s’organisent pour changer autrement que dans l’urgence et sous la contrainte. Elles provoquent le changement avant de le subir. En résumé, elles considèrent que plus aucun avantage concurrentiel n’est pérenne et qu’une compétence distinctive ne peut être qu’éphémère.

Ces entreprises sont pour le moment en majorité concentrées dans le secteur des nouvelles technologies, celui du digital en particulier. Un univers dans lequel on vit constamment en version « beta ». Mais d’autres secteurs d’activité présentent des caractéristiques de plus en plus similaires. Si ce modèle n’a pas vocation à se généraliser sur le court terme, parions qu’il va au moins s’étendre à moyen terme.

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Le changement n’est cependant plus un problème de management (manager le changement), mais de design organisationnel. Il s’agit de concevoir des organisations dont la finalité n’est plus la stabilité, mais l’adaptabilité.

4 COMMENTS

  1. Poser le problème du changement en termes de design organisationnel et non de management répond infiniment mieux, me semble-t-il, à la prise en compte de la complexité de la réalité et du système que constitue l’entreprise.
    Merci pour cet éclairage loin du “traitement” réducteur infligé par la pseudo-solution de “management du changement”, de surcroît volontiers confié aux seuls managers opérationnels.

  2. La mise en place du changement sur un projet peut facilement être compromis si la structure organisationnelle n’est pas prévue pour faciliter sa mise en œuvre ou la consolidation des changements mis en œuvre. A mon sens, le développement de l’entreprise neuronale, qui exploite la pensée préfrontale, souple, adaptable et créative est une solution à considérer avec sérieux.
    Repenser nos structures et penser l’entreprise différemment pour intégrer le changement dans son ADN est le moyen de mieux faire face à ce qui devient une obligation pour les entreprises l’adaptation au changement.

    http://www.ekilium.fr

  3. […] Dans une démarche de changement, la consolidation, troisième moment du processus de la transition (voir mon billet sur la différence entre changement et transition), doit être suffisante pour éviter un retour en arrière trop significatif et, surtout, un retour au point de départ. Il s’agit, pour parler comme les économistes, de créer un « effet de cliquet ». En même temps, la consolidation ne doit pas être trop importante pour ne pas fossiliser la nouvelle organisation. Surtout dans le contexte  […]

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