Les 6 clés de la transformation permanente

Les 6 clés de la transformation permanente

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Avec l’accélération du rythme des changements et la complexification des environnements, la transformation n’est plus un épisode temporaire délimité dans le temps avec un début et une fin. Elle est devenue un processus permanent et continu. Il ne s’agit plus de s’organiser, puis se transformer pour s’organiser autrement. Il faut, au contraire, s’organiser et se transformer simultanément et en continu. Au-delà de l’intention, comment procéder concrètement ?

Cela n’est possible qu’en ré-envisageant la relation entre l’organisation et sa transformation. Elles ne peuvent plus être disjointes. Il faut, au contraire, les penser comme les deux faces d’une même pièce.

Dans mon dernier ouvrage « Transformer son organisation » paru chez Maxima, je propose 6 clés pour articuler organisation et transformation et, ainsi, faire de cette dernière un processus permanent et continu.

Clé N°1 : Faire de la culture l’axe de la transformation

C’est en général seulement quand il faut changer la culture d’entreprise que l’on se souvient que toute organisation est aussi un système culturel. Et encore, il s’agit le plus souvent d’une simple ligne inscrite au bas d’un « slide » dans les projets de transformation : « Impact sur la culture et changement des comportements ». Pourtant, Peter Drucker, le pape du management moderne, nous a bien prévenus : « La culture mange la stratégie au petit-déjeuner ! »

Transformer son organisation en faisant abstraction de son passé et de son histoire relève d’un fantasme de toute-puissance. On ne se transforme jamais en partant d’une « page blanche » ; sinon, on se forme.

Paradoxalement (mais en apparence seulement), pour faire entrer son organisation dans un processus de transformation permanente, il faut commencer par identifier ce qu’on a l’intention de ne pas changer ; ce sur quoi on va se reposer pour se transformer ; ce autour de quoi on va pivoter. A cet égard, il convient d’appréhender la culture plus comme une ressource pour la transformation que comme un objet de changement.

Cliquez ici pour en savoir plus sur cette première clé.

Clé N°2 : Mettre en place une double structure permettant de s’organiser et se transformer en même temps et de manière continue

On est naturellement tenté de créer une entité dédiée à la transformation, puis de recruter un « Business Transformation Leader », le nommer au comité de direction et le doter d’une équipe composée des meilleurs potentiels de l’entreprise. C’est une erreur !

En faisant cela, on délègue la transformation à une personne et/ou à un département. Ainsi, on acte le fait qu’elle n’est pas l’affaire de tous. Au sein de l’équipe de direction, il y a « Monsieur ou Madame Transformation », les autres membres restant centrés sur le fonctionnement de l’organisation en place. Tout le monde aura naturellement tendance à se décharger des problèmes de transformation sur celui ou sur celle qui en est responsable. Au total, non seulement on ne profitera pas de la dynamique de l’organisation à se transformer, mais, en plus, on risque de créer artificiellement des résistances au changement.

Comment faire pour que la transformation soit l’affaire de tout le monde et pas seulement d’un département dédié ? Comme le suggère John Kotter, professeur à la Harvard Business School, il convient de créer une double structure. A la structure « pyramidale », dont la fonction est de s’organiser pour produire au quotidien, il s’agit d’en superposer une seconde en charge de la transformation. Cette dernière prend la forme d’un réseau dont les nœuds sont constitués de projets de transformation.

La première est centrée sur le « run », la seconde sur le « build ». Mais attention, ces deux dimensions ne sont pas juxtaposées, comme certains modèles le proposent, mais imbriquées l’une à l’autre. Elles sont « habitées » par les mêmes personnes. Il n’y a pas d’un côté les « producteurs » et de l’autre les « transformeurs ». Les « producteurs » sont également les « transformateurs », et réciproquement.

Cela amène à revoir l’allocation des ressources, mais aussi les définitions de fonction, la fixation des objectifs et, plus largement, l’ensemble des processus de gestion des ressources humaines pour que les deux « rôles » soient officialisés, valorisés et reconnus. Sans quoi la double structure reste une abstraction et une déclaration d’intention.

Cliquez ici pour en savoir plus sur cette deuxième clé.

Clé N°3 : Combiner les logiques de transformation de base, l’alignement stratégique et l’agilité organisationnelle, pour conjuguer leurs effets

Selon quelle logique de transformation les projets du portefeuille doivent-ils être conduits : l’alignement stratégique ou l’agilité organisationnelle ? La réponse est : cela dépend de leurs enjeux et de leurs caractéristiques.

La logique de l’alignement stratégique vise à concevoir et mettre en œuvre des combinaisons organisationnelles harmonieuses adaptées aux exigences de performance et aux caractéristiques de l’environnement. Cette congruence interne et cette adaptation externe permettent d’obtenir des comportements conformes au but poursuivi. La logique de l’alignement stratégique appréhende la transformation comme le passage d’une organisation A à une organisation B marqué par une rupture dans une dynamique top-down allant du global vers le local.

La logique de l’agilité organisationnelle vise, elle, non pas à concevoir des combinaisons congruentes comme la logique de l’alignement stratégique, mais à maximiser le potentiel combinatoire de l’organisation pour agencer et ré-agencer ses unités au gré d’évolutions peu prévisibles. La transformation est appréhendée comme un processus incrémental dans une dynamique bottom-up allant du local vers le global.

Conjuguer ces deux logiques de transformation nécessite de faire preuve de discernement et de savoir recourir plutôt à l’une qu’à l’autre en fonction des enjeux. Mais les conjuguer, c’est-à-dire tirer parti de leurs complémentarités et dépasser leurs antagonismes, consiste aussi à être capable de mixer les logiques organisationnelles au sein d’un même projet.

Cliquez ici pour en savoir plus sur cette troisième clé.

Clé N°4 : Prendre appui sur le potentiel technologique, notamment digital

La transformation digitale n’est pas seulement une affaire de technologie, c’est entendu ! Mais elle ne se réduit pas non plus à un problème de conduite du changement. C’est aussi un sujet de design organisationnel.

Comment faire ? Un raisonnement en trois temps est nécessaire. Il s’agit de commencer par identifier en quoi et comment la structure de l’organisation ne permet pas de répondre à ses besoins de transversalité et d’adaptabilité. Ensuite, on cherche du côté du digital les solutions permettant de favoriser l’expression et le développement de l’agilité pour satisfaire aux besoins identifiés. Enfin, on ancre le potentiel de coopération permis par les solutions digitales dans de nouvelles modalités organisationnelles pour éviter la superposition non articulée du digital et de l’organisation.

Ces trois temps forment une boucle. Ils permettent de ne pas disjoindre, mais au contraire de combiner technologies et organisation de manière à conjuguer leurs effets.

Cliquez ici pour en savoir plus sur cette quatrième clé.

Clé N°5 : Diffuser la pensée complexe au sein de l’organisation

Articuler l’organisation et la transformation et, ainsi, faire de cette dernière un processus permanent et continu, nécessite aussi d’appréhender le « monde » de manière différente. Il faut adopter les principes de ce que l’on nomme maintenant couramment la « pensée complexe » telle que développée par Edgar Morin.

Dans une situation complexe, il convient de :

  • avoir conscience de sa perception et de son cadre de référence ;
  • renoncer à considérer sa perception comme unique ;
  • réaliser que ce cadre de référence et celui des autres peuvent être différents ;
  • accepter la perception des autres.

Ce mouvement en quatre temps permet à chacun de prendre conscience que sa représentation de la réalité est partielle. Il évite ainsi qu’elle devienne partiale, c’est-à-dire de prendre une partie, celle qu’il perçoit, pour le tout.

Dans le monde de la complexité, c’est en multipliant les points de vue et en tirant profit de leur différence qu’on arrive à avoir la représentation la plus riche d’un problème et d’un éventail de solutions. C’est en combinant des éclairages différents qu’on peut accroître l’intelligibilité par touches successives.

C’est à ce prix et à ce prix seulement que l’on peut sortir de la logique du « OU » pour entrer dans la logique du « ET » pour relier et non pas dissocier les deux dimensions d’une même réalité :

  • l’organisation ET la transformation ;
  • l’alignement stratégique ET l’agilité organisationnelle ;
  • la transformation des organisations ET la transformation digitale ;

Cliquez ici pour en savoir plus sur cette cinquième clé.

Clé N°6 : Utiliser la dynamique de la transformation pour mettre l’organisation en mouvement

Au moment de la composition du portefeuille, il est pertinent de sélectionner des projets qui s’inscrivent dans des référents temporels différents : court, moyen et long terme. Cela permet de favoriser la dynamique de la transformation. Au-delà de leur horizon temporel, il n’est souvent pas envisageable de lancer tous les projets de transformation en même temps. Il faut donc les prioriser. L’ordonnancement de certains est fortement contraint : le projet N ne peut pas débuter tant que le projet M n’est pas complètement achevé. Mais, dans d’autres cas, la latitude de choix est plus importante.

Le séquencement résulte d’une priorisation à effectuer. Deux critères viennent naturellement à l’esprit :

  • le souhaitable au sens de ce qui est le plus important ;
  • le possible, c’est-à-dire celui qui, compte tenu des résistances et des oppositions escomptées, a le plus de chance de ne pas capoter.

Les projets à la fois souhaitables et possibles constituent, évidemment, les priorités. Mais après eux, doit-on prioriser plutôt les projets souhaitables et peu possibles, ou l’inverse ?

Dans une grande majorité de cas, il convient de privilégier le possible sur le souhaitable. Cela favorise l’émergence ou le renforcement d’un effet « boule de neige ».

Dans la gestion du portefeuille de projets, il ne faut pas hésiter à arrêter ceux qui s’enlisent et ne débouchent pas suffisamment rapidement sur des résultats tangibles. Il faut également raisonner par grappes à partir des projets qui produisent des effets significatifs. Un projet qui a abouti peut se décliner en plusieurs projets adjacents qui bénéficieront de la dynamique associée à son succès.

Ce premier principe doit être complété de trois autres pour mettre l’organisation en mouvement grâce à la dynamique de la transformation :

  • faire varier les rythmes ;
  • mesurer à partir d’indicateurs ;
  • prévoir que l’on ne fera pas ce que l’on a prévu de faire.

Cliquez ici pour en savoir plus sur cette sixième clé.

Six clés, un système

Ces clés interagissent les unes sur les autres. Prises isolément, elles sont moins efficaces, voire inutiles. Par exemple, mettre en place une double structure, sans conjointement déployer les cinq autres clés, a peu de chances de déboucher sur une véritable transformation permanente.

Leur mise en œuvre dépend du contexte, des enjeux et des caractéristiques de l’entreprise. Chaque dispositif est donc à construire « sur-mesure ». En matière de transformation permanente, les « copier-coller » ne sont jamais de bons amis.

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