La rémunération : un facteur de motivation ?

La rémunération : un facteur de motivation ?

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Dans un billet précédent, j’interrogeais le lien entre la motivation et la performance. La question ici est de savoir dans quelle mesure la rémunération est un facteur de motivation pertinent.

La motivation : un petit moteur

Il y a quelques décennies, la notion de motivation était l’apanage d’une poignée de psychologues. Son succès débouche sur un certain nombre d’applications simplificatrices. Le mot motivé est aujourd’hui employé à tout bout de champ. Il est même utilisé pour différencier les personnes entre-elles : les motivées d’un côté, les non-motivées de l’autre. Ce qui ne rend compte que d’une partie des choses.

Etymologiquement, motivation se rattache à motif : ce qui pousse à faire quelque chose. Tout le monde est motivé, mais pas par la même chose. La motivation est le « petit moteur » que nous avons tous en nous.

Un “mix” rétributions

Petit moteur que nous n’alimentons pas tous avec le même carburant. Le travail salarié est un échange socio-économique : des contributions contre des rétributions à la fois matérielles (salaire, bonus, avantages en nature,…) et immatérielles (intérêt du travail, autonomie, responsabilités, perspectives de carrière,…). Ce que chaque salarié, quel que soit son niveau hiérarchique, obtient en échange de son travail est un “mix” rétributions. Tous n’attachent pas la même valeur aux différents types de rétributions.

La nature du poste compte : commerciaux et chercheurs n’ont, en général, pas les mêmes attentes à l’égard du travail. Les dispositions psychologiques, sociales, culturelles,… des titulaires jouent aussi. Certains valorisent plus l’intérêt du travail et la possibilité de s’y épanouir que la rémunération. Pour d’autres, c’est l’inverse.

La rémunération est donc un facteur de motivation plus ou moins pertinent. D’autres s’avèrent complémentaires, parfois même plus judicieux. Et incitent davantage à la performance, si la situation y est propice, évidemment.

Des différences trop faibles pour être réellement incitatives

Même chez une personne particulièrement sensible au gain financier, pour qu’une pratique de rémunération soit motivante, encore faut-il que les différences d’augmentation ou de bonus entre ceux qui sont performants et ceux qui ne le sont pas soient significatives. Si tout le monde touche peu ou prou la même chose, à quoi bon se décarcasser ? Il semble bien que ce soit là que le bât blesse. A regarder de près les pratiques, on est frappé par le décalage entre, d’une part, des dispositifs lourds et, d’autre part, des différences de rémunération relativement faibles, voire ridicules.

Pourquoi des différences de rémunération si faibles ? En période de faible inflation, comme celle que nous connaissons depuis plusieurs années, les hausses de salaire sont modérées. En conséquence, les enveloppes consacrées aux augmentations individuelles et aux primes diverses et variées sont réduites. Mais là n’est pas la seule raison ! La plupart des salariés sont évalués comme moyens : ni bons ni mauvais. Résultat, les différences sont lissées.

La fameuse courbe de Gauss

Cette manière de faire est même souvent recommandée : « la distribution des augmentations doit suivre une courbe de Gauss » recommande la procédure dans nombre d’entreprises. On peut s’étonner de voir appliquer une loi de répartition statistique, qui n’a de sens que pour de grandes populations, à des services de faibles effectifs. En fait, cette loi est détournée de son objet. Il s’agit de limiter les conséquences de la pratique par ailleurs mise en place. Pour rendre supportable une rémunération des performances qui n’a pas toujours gagné sa légitimité, pour remplacer l’équité par l’égalité. Chassez le naturel, il revient au galop !

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