Mon dernier ouvrage « Misez sur l’autonomie de son équipe. Choisir l’auto-organisation pour sortir du modèle pyramidal », paru chez De Boeck en janvier 2024, est consacré aux équipes auto-organisées.
Les évolutions économiques, technologiques, sociales et sociétales ne cessent de complexifier l’environnement des entreprises. Le rythme des changements s’accélère, les facteurs de performance se multiplient, le tout dans des contextes d’action toujours plus incertains, volatiles et turbulents. En matière d’organisation, cette complexification met à mal le modèle pyramidal dont les principes ont été définis au début du XXème siècle dans un contexte qui n’a plus grand-chose à voir avec celui d’aujourd’hui.
Les tentatives visant à s’affranchir du modèle pyramidal se sont multipliées depuis le début du XXIème siècle. Les expérimentations prennent des formes et des appellations différentes : agilité à l’échelle, entreprise libérée, entreprise Opale, Holacratie…. Plus ou moins heureuses, ces démarches ont toutes un point commun : le développement de l’autonomie au sein de l’entreprise et, plus spécifiquement, la mise en place d’équipes auto-organisées, c’est-à-dire d’équipes au sein desquelles les coéquipiers décident en toute autonomie de la manière d’organiser leur travail.
Remises au goût du jour, les équipes auto-organisées ne sont pas si nouvelles que cela. On en trouve de premières traces dans les mines de charbon anglaises dès les années 1950. Des démarches d’auto-organisation ont par la suite été déployées dans différents secteurs d’activité tout au long de la seconde moitié du XXème siècle. Parmi elles, on peut citer les équipes autonomes de production, la Sociocratie, les Team-Based Organizations ou encore les équipes agiles.
Ces diverses approches ont, chacune à leur manière, apporté une contribution significative à la compréhension et à la conception des équipes auto-organisées. Mais elles sont toutes fortement ancrées dans un contexte spécifique : le secteur industriel pour les équipes autonomes de production ; les entreprises et les associations en quête d’un fonctionnement plus démocratique pour la Sociocratie ; les entreprises de prestations intellectuelles composées de travailleurs du savoir pour les Team-Based Organizations ; et le domaine du développement informatique pour les équipes agiles.
Le cercle vertueux de l’auto-organisation
La forte contextualisation de ces approches pionnières rend leur extension difficile, voire impossible. Il est par exemple périlleux de déployer des équipes autonomes en dehors des ateliers de production des entreprises industrielles ou des équipes agiles au-delà du périmètre des départements informatiques.
Partant de ce constat, l’ambition de cet ouvrage est de proposer une méthodologie, baptisée le « Cercle vertueux de l’auto-organisation » (voir mon billet qui présente la méthodologie), permettant aux managers de développer l’auto-organisation de leur équipe quelles que soient la nature et les caractéristiques de leur activité.
Compte tenu de la complexification de l’ensemble des contextes d’action, la question de l’auto-organisation des équipes ne concerne plus seulement certains secteurs d’activité spécifiques ou certaines fonctions particulières au sein des entreprises. Elle s’est largement étendue ces dernières années. Cette extension s’accélère aujourd’hui avec l’émergence et le développement d’un management hybride fait de présentiel et de distanciel.
Le management hybride : un accélérateur du développement de l’autonomie au travail
Le télétravail contraint liés aux confinements successifs de la crise sanitaire de la Covid 19 a eu deux effets opposés sur les pratiques managériales. Certains managers, anxieux de ne plus avoir leurs collaborateurs sous la main toute la journée, ont renforcé les contrôles grâce à des outils digitaux permettant une traçabilité bien supérieure aux points de suivi qu’ils avaient pris l’habitude d’organiser en présentiel. Au contraire, d’autres ont d’emblée accordé davantage d’autonomie à leurs collaborateurs en se concentrant plus sur les résultats que sur la manière de les obtenir.
Les accords varient, mais aujourd’hui les entreprises offrent la possibilité à leurs salariés de télétravailler en moyenne deux jours par semaine. Que constate-t-on avec maintenant plus de trois années de recul ? L’inscription d’un management hybride dans la durée passe nécessairement par le développement de l’autonomie au travail. Le renforcement du contrôle a été possible sur le court terme, mais n’est pas tenable à moyen ou long terme.
L’autonomie au travail concerne les collaborateurs, mais aussi les équipes. Les managers sont formés depuis des décennies aux pratiques et aux postures à adopter pour favoriser l’autonomie de leurs collaborateurs. En revanche, ils sont souvent désarmés pour développer celle de leur équipe dans la mesure où, en général, peu de choses leur sont proposées en la matière. Le « Cercle vertueux de l’auto-organisation » ambitionne de combler cette lacune.
Développer l’auto-organisation d’une équipe dans une entreprise pyramidale
Toutes les entreprises n’ont pas adopté et n’adopteront pas dans les prochaines années une organisation cellulaire dans laquelle les équipes auto-organisées se sont substituées aux pyramides hiérarchiques comme unités organisationnelles de base (voir mon billet sur le sujet). Pour autant, cela signifie-t-il qu’il est impossible de développer l’auto-organisation de certaines équipes en leur sein ? Absolument pas ! L’organisation cellulaire n’est pas la seule manière de déployer l’auto-organisation au sein d’une entreprise. Une autre démarche, moins ambitieuse mais très pragmatique, est possible.
Tout comme chacun d’entre nous peut, à son niveau, adopter des gestes écologiques pour protéger l’environnement sans attendre que nos gouvernants s’accordent sur des mesures globales pour sauver la planète, chaque manager peut, en accord avec ses collaborateurs, développer l’auto-organisation de son équipe alors même que l’organisation de son entreprise reste, elle, parfaitement pyramidale.
Le manager, qui souhaite développer l’auto-organisation de son équipe dans le cadre d’une entreprise pyramidale, continue de fixer les objectifs et d’évaluer les résultats. En revanche, il délègue à l’équipe l’ensemble des questions d’organisation.
En matière d’auto-organisation, chaque équipe doit trouver sa voie et son propre chemin. Avant d’être une équipe auto-organisée à part entière, une équipe passe par un certain nombre d’états intermédiaires dans lesquels elle ne fonctionne plus complètement comme une pyramide hiérarchique et pas encore comme une équipe auto-organisée. Ce n’est pas grave, bien au contraire. L’auto-organisation est plus une intention qu’une cible. Le chemin compte davantage que la destination.
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