Le leadership : une synthèse

Le leadership : une synthèse

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Les approches traditionnelles, développées dans les articles précédents, emploient un même terme, le leadership, pour parler de choses très différentes. Chaque définition est arbitraire et subjective. Il serait vain de se mettre en quête de la « bonne » définition, chacune ayant sa propre utilité en fonction d’un contexte particulier. Ici, nous nous intéressons aux managers. Ce faisant, parmi ces positions, certaines ne résistent pas à la double constatation suivante : (1) certains managers sont des leaders ; (2) certains leaders ne sont pas managers.

Leadership et management ne s’excluent pas mutuellement

Si certains managers peuvent aussi être des leaders alors la différence entre le management et le leadership ne peut pas tenir à une question de personnalité. Leadership et management ne s’excluent pas mutuellement. En outre, si on peut être leader sans être manager alors le leadership ne se réduit pas non plus à un rôle de management, voire à la manière d’exercer une fonction managériale. Dans notre contexte, celui du leadership des managers, seules les approches de John Kotter (leadership et management sont deux fonctions différentes) et de Warren Bennis et Burt Nanus (le leadership, c’est des compétences spécifiques qui s’acquièrent et se développent) résistent donc à l’épreuve des faits. Pour aller plus loin, il faut cependant davantage préciser leur articulation en faisant un détour succinct sur les conditions de la performance d’une entreprise.

3 fonctions doivent être correctement remplies

Pour qu’une organisation soit performante, trois fonctions doivent être correctement remplies en son sein : la direction, la production et le management. L’objet de la fonction de direction est de donner un cap à l’entreprise, c’est-à-dire de déterminer le but à atteindre et le chemin à emprunter pour y parvenir. Derrière le but, il y a la question fondamentale de la performance. Il n’y a pas une seule performance avec un P majuscule.

Chez certaines entreprises, la performance est exclusivement financière. Elle se mesure par le retour sur investissement. Pour d’autres, la performance est avant tout technique. Elle réside dans la capacité à innover. Avec la vogue actuelle du développement durable, la responsabilité sociale figure aussi maintenant au registre des critères de performance de certaines entreprises. La performance n’est pas seulement économique. Elle est aussi technique, commerciale, sociale, voire environnementale ou sociétale. Elle ne concerne pas uniquement le court terme. Elle doit au contraire s’apprécier sur des horizons de temps différents.

La performance : une notion multidimensionnelle

Bref, c’est une notion multidimensionnelle dont l’appréciation nécessite de recourir à plusieurs critères. En matière de performances, le pluriel est préférable au singulier. Il n’y a pas une, mais des performances. Mais aucune entreprise ne peut maximiser simultanément les performances économiques, commerciales, sociales,… Il faut choisir, équilibrer, hiérarchiser. C’est le but de la fonction de direction : définir le type de performances recherchées par l’entreprise et veiller à ce que les performances produites soient conformes aux performances recherchées.

Produire, c’est transformer des matières premières ou des informations en produits finis ou services à destination d’un client (externe ou interne à l’entreprise). Ici, nous utilisons le terme production au sens large. Les opérateurs dans les ateliers produisent, mais ils ne sont pas les seuls. Chaque mois, le chef comptable produit un arrêté des comptes, les vendeurs produisent des rapports de visite, le DRH un bilan social, la secrétaire le compte rendu d’une réunion,… Cette transformation « d’inputs » en « outputs » s’effectue grâce à un travail. La production matérielle résulte d’un travail manuel ou mécanique. La production immatérielle résulte, elle, d’un travail intellectuel.

Travail et performance ne sont pas synonymes

Si on peut difficilement être performant sans travailler, on peut très bien travailler, même beaucoup, sans être performant. Travail et performance ne sont pas synonymes. Il n’y a pas de lien mécanique entre la quantité de travail produite et la performance obtenue. Les départements les plus performants ne sont pas forcément ceux où l’on travaille le plus. Pourquoi ? Parce que le passage du travail à la performance n’est pas automatique. Il ne s’effectue pas tout seul. Au contraire, il nécessite une action spécifique. C’est la finalité de la fonction de management. Celle-ci vise à transformer du travail, issu de la fonction de production, en performances, dont les caractéristiques ont été définies par la fonction de direction.

La comparaison entre le management et le leadership permet de mettre de l’ordre dans les idées. De ce point de vue, la comparaison est fructueuse. Mais, en même temps, elle est trompeuse. Pourquoi ? Parce que, en fait, on compare des choses de nature différente. En effet, le management est une fonction (au même titre que la direction et la production) alors que, contrairement à la proposition de John Kotter, le leadership ne l’est pas. Comme le propose Warren Bennis et B. Nanus, le leadership se rapporte plutôt à une capacité à agir, c’est-à-dire à des compétences. Le leadership, c’est la capacité à mobiliser dans une direction donnée. Mais, et c’est là où malgré tout l’introduction dans le débat de la notion de fonction prend tout son sens, ces compétences permettent d’exercer des activités qui relèvent à la fois des fonctions de direction et de management.

Un dirigeant peut être un stratège sans être un leader

Diriger, c’est tout à la fois donner une orientation et une signification. C’est donc répondre à deux questions : où va-t-on et pourquoi y allons-nous ? Les réponses à la première question relèvent du domaine de la stratégie, les réponses à la seconde du leadership. Un dirigeant peut-être stratège sans être leader, et inversement. Le dirigeant leader sait donner une signification à l’orientation retenue. C’est bien ce que, sous une forme ou sous une autre, s’accordent à reconnaître tous les auteurs précédemment cités. En matière de leadership, quand on parle de sens, on parle d’abord de signification.

Manager, c’est transformer du travail en performance. Pour ce faire, le manager cherche à obtenir de la part de ses collaborateurs des comportements qu’ils n’adopteraient pas spontanément. Pour cela, il peut s’y prendre de différentes manières. Il peut utiliser l’autorité statutaire attachée à sa fonction et donner des ordres. Il peut aussi activer ses capacités de leadership pour mobiliser ses collaborateurs plutôt que les contraindre. Tous les managers ne sont pas des leaders, mais certains mobilisent leur leadership pour exercer leur fonction managériale.

En guise de synthèse des approches traditionnelles

On retiendra que (1) le leadership est une capacité à mobiliser dans une direction donnée ; (2) cette capacité permet d’exercer des activités qui relèvent tout à la fois des fonctions de direction et de management ; (3) cette capacité, que l’on peut acquérir et développer, est attachée à une personne et non à une fonction. Par exemple, on peut exercer une fonction managériale et ne pas posséder de compétences de leadership. Inversement, on peut posséder des compétences de leadership et ne pas exercer de fonction managériale.

7 COMMENTS

  1. Cet article est d’une très grande clarté. Pour ma part, j’ajouterai que sur le papier les différentes fonctions sont parfois clairement réparties et dans la vie réelle, cela demande un travail d’identifier comment elles s’exercent car elles sont souvent enchevêtrées

  2. Merci de ce commentaire, Bernard ! Tu as tout à fait raison. C’est bien parce que dans la réalité elles sont enchevêtrées que le travail d’identification dont tu parles est souvent nécessaire. Sinon tout est dans tout et on ne comprend plus les choses ou plus suffisamment pour agir avec pertinence.

  3. […] Les approches traditionnelles, développées dans les articles précédents, emploient un même terme, le leadership, pour parler de choses très différentes. Chaque définition est arbitraire et subjective. Il serait vain de se mettre en quête de la « bonne » définition, chacune ayant sa propre utilité en fonction d’un contexte particulier. Ici, nous nous intéressons aux managers. Ce faisant, parmi ces positions, certaines ne résistent pas à la double constatation suivante : (1) certains managers sont  […]

  4. quel est la différence entre leadership et management donnez nous quelques points divergents en quoi ça impacte la rentabilité d’une organisation

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