J’entends souvent de la part des dirigeants des réticences à questionner leur organisation et, en conséquence, à la travailler : « On ne sait pas très bien dans quoi on se lance ; on sait quand on commence mais jamais quand on termine ; on ne sait pas très bien par quoi commencer et, surtout, comment s’y prendre concrètement ; on va se heurter à des jeux de pouvoir et à des résistances au changement ; on n’aura pas achevé de mettre en œuvre la nouvelle organisation qu’il faudra déjà imaginer la suivante ; etc. » Bref, la liste des griefs est longue.
Résultat : on se réorganise quand on est au pied du mur, quand les dysfonctionnements sont tels que l’on ne peut plus faire autrement que de changer, le plus souvent brutalement et dans la douleur. L’organisation devient alors un sujet délicat que l’on évite d’aborder tant que l’on n’y est pas contraint. Et quand on décide de s’y coller, il est souvent trop tard pour l’aborder avec sérénité.
Partant de ces constats, IM Conseil & Formation a développé une méthodologie permettant à une équipe de direction de revoir son organisation rapidement et dans la sérénité… sans pour autant s’en tenir à refaire le nième organigramme dont tout le monde sait très bien qu’il ne changera rien par rapport au précédent, si ce n’est des cases et des lignes sur un bout de papier (ce que les Anglo-saxons appellent de la Boxology).
Comment procéder ? Une équipe de direction (celle d’une entreprise, d’une division, d’une direction…) se réunit pendant deux jours et travaille en 5 temps.
Premier temps : Reconstituer le profil de son organisation
Les paramètres de conception (voir mon billet à ce sujet) sont les leviers actionnables pour façonner une organisation. Il y a cinq grands paramètres de conception interdépendants :
- L’allocation de l’autorité ;
- Le regroupement des activités ;
- L’orientation de l’action ;
- La responsabilité de la performance ;
- La régulation des comportements.
Les cinq paramètres de conception constituent des couples de forces en tension à la fois complémentaires et antagonistes : le central et le local pour l’allocation de l’autorité, le fonctionnel et le divisionnel pour le regroupement des activités, le vertical et l’horizontal pour l’orientation de l’action, l’individuel et le collectif pour la responsabilité de la performance et, enfin, le formel et l’informel pour la régulation des comportements.
Les cinq paramètres de conception permettent de reconstituer le profil organisationnel d’une entité quelle qu’elle soit : une entreprise, une des directions d’une entreprise, un des services d’une direction… En fonction de ses caractéristiques, il s’agit de positionner l’entité sur l’un des quatre états de chacun des paramètres de conception. Pour l’allocation de l’autorité par exemple, les quatre états sont : « Centrale », « Plutôt centrale », « Plutôt locale » et « Locale ». Les paramètres de conception étant interdépendants, le profil organisationnel fait système.
Deuxième temps : Evaluer son alignement stratégique
Une organisation n’est pas une fin en soi mais un moyen de déployer une vision stratégique. Le diagnostic organisationnel d’une entité commence ainsi par la formalisation de sa vision stratégique à travers une mission (ce que l’entité fait, pour qui et où), une ambition (ce que l’entité souhaite devenir), des enjeux stratégiques à moyen terme et des valeurs (voir mon billet à ce sujet).
Pour mesurer le degré d’alignement stratégique d’une organisation, la notion de capacité organisationnelle est très utile (voir mon billet à ce sujet). De quoi s’agit-il ? Les capacités organisationnelles sont les compétences dont l’organisation a besoin pour déployer sa vision stratégique. Pour les identifier, la question clé à se poser est : « Dans le but de déployer sa vision stratégique, notre organisation a besoin d’être capable de… ».
Une fois identifiées, les capacités organisationnelles sont hiérarchisées puis pondérées au regard de leur importance dans le déploiement de la vision stratégique. Pour mesurer son degré d’alignement stratégique, l’organisation est enfin évaluée sur chacune des capacités organisationnelles à partir d’une échelle à quatre positions : « Tout à fait aligné », « Plutôt aligné », « Plutôt pas aligné » et « Pas du tout aligné ».
Troisième temps : Mesurer les écarts par rapport à son modèle de référence
Un modèle organisationnel est une organisation générique dont les cinq paramètres de conception sont en équilibre et en harmonie. On distingue cinq grands modèles organisationnels (voir mon billet à ce sujet) au premier chef en fonction de la manière dont l’autorité est allouée :
- L’organisation personnalisée (autorité concentrée) ;
- L’organisation bureaucratique (autorité concentrée) ;
- L’organisation managériale (autorité déléguée) ;
- L’organisation duale (autorité partagée) ;
- L’organisation cellulaire (autorité répartie).
Chaque modèle organisationnel est plus ou moins adapté à un contexte d’action particulier appréhendé à partir du degré de complexité du système à organiser (voir mon billet à ce sujet). L’évaluation de ce dernier permet d’identifier le modèle de référence de l’organisation. En comparant le profil de l’organisation à celui de son modèle de référence, on peut identifier les paramètres de conception convergents et divergents. Cela constitue le second niveau du diagnostic organisationnel.
Quatrième temps : Synthétiser ses points forts et ses axes de progrès
La formalisation des points forts d’une organisation est réalisée à partir de deux sources : d’une part, les capacités organisationnelles qui ont été bien évaluées (note de 3 ou de 4) ; d’autre part, les paramètres de conception convergents entre le profil de l’organisation et celui de son modèle de référence.
Les axes de progrès sont eux aussi repérés à partir de deux sources : d’une part, les capacités organisationnelles qui ont été mal évaluées (note de 1 ou de 2) ; d’autre part, les paramètres de conception divergents entre le profil de l’organisation et celui de son modèle de référence.
Cinquième temps : Elaborer un plan d’actions organisationnel
Le plan d’actions vise à capitaliser sur les points forts de l’organisation et à faire évoluer cette dernière selon les axes de progrès identifiés. Il s’agit de reprendre les cinq paramètres de conception et de répondre à 4 questions : Quoi faire ? Comment ? Avec qui ? Et quand ?
Agrégés les uns aux autres, les plans d’actions permettent de formaliser et de déployer une nouvelle organisation plus ou moins en rupture par rapport à l’organisation actuelle.
Répété à échéances régulières, ce travail permet d’aborder les questions d’organisation de manière préventive et pas seulement curative. L’organisation évolue ainsi au fil de l’eau dans la sérénité et plus par à-coups dans des réorganisations brutales et anxiogènes.
Cette démarche est détaillée dans mon ouvrage “L’organisation en mouvement. Adopter le changement permanent” accessible en cliquant ici.